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«Bien à vous», «belle journée», «je vous partage ce document» : les fautes et expressions qui vous cataloguent en un seul mail

Source : Madame Figaro - Morgane Miel



CONSEILS - Il y a les expressions qu’on pense à tort élégantes, celles que l’on reprend par mimétisme. L’épineuse question de l’accord du participe passé ou des verbes pronominaux, qui nous poursuit depuis le primaire. Et bien sûr, la formule de fin de mail.

««Bien à vous», «belle journée», «je vous partage ce document» : les fautes et expressions qui vous cataloguent en un seul mail» fait partie des articles préférés des abonnés du Figaro. Nous vous proposons de le découvrir ou de le relire.


Il en va des mails comme des tenues vestimentaires, ou de la tenue tout court : au détour d'une phrase, d'un mot, c'est toute une éducation, un savoir-vivre - ou pire : leur absence, qui transparaissent et peuvent rapidement cataloguer leur auteur. Sans jouer les Nadine de Rothschild, et toute précaution prise par ailleurs –n'est-on pas toujours le «plouc» de quelqu'un ? - certaines erreurs sont plus gênantes que d'autres, surtout dans un mail professionnel censé représenter également l'entreprise. Ou permettre de décrocher un rendez-vous, un client, un poste. Au-delà même de l'image, il peut y avoir un intérêt certain à sortir du jargon corporate pour écrire normalement, et éviter les formules déraisonnables, du type : «Je vous partage ce document qui vous expliquera bien le trend» - arrêt cardiaque garanti. Que celui qui rêve de s'infliger telle lecture dès potron-minet, l'esprit encore embué derrière son écran, lève la main ! Le point sur les erreurs ou expressions à éviter d'urgence, avec Anne-Marie Gaignard, auteure de Coaching pour un mail efficace et sans faute* et de nombreux ouvrages de référence sur l'orthographe.


On ne commence pas un mail par «je»


L'usage exige qu'on ne se mette pas en avant de prime abord, et que l'on réserve tout pronom («vous», «nous») à la seconde partie de la phrase. On peut ainsi démarrer par un adjectif, ou un adverbe : «À la suite de notre entrevue…» ; «Dans l'attente de vous rencontrer le xx mai prochain, je vous prie de bien vouloir trouver ici…» ; «Merci infiniment de votre mail, voici comme convenu les documents XY…». Une façon finalement très directe d'entrer dans le vif du sujet.


L'accord du participe passé


C'est l'erreur la plus répandue dans les mails. Le «-é» remplaçant souvent l'infinitif (-er), le pluriel (-és) ou le féminin (-ée). «C'est l'erreur la plus rédhibitoire, avance Anne-Marie Gaignard. Celle qui peut envoyer un mail de recherche d'emploi à la poubelle, direct.» Si l'on revient aux fondamentaux, la grammaire veut qu'en présence de l'auxiliaire être, on accorde le participe passé avec le sujet. Et qu'en présence de l'auxiliaire avoir, on l'accorde avec le complément d'objet direct, si celui-ci est placé avant le verbe. Attention au cas du participe passé suivi de l'infinitif -exemple : la musique que j'ai entendu jouer. Comme la musique ne joue pas, le participe passé ne s'accorde pas. En revanche, dans «la fille que j'ai vue jouer», le participe s'accorde, car c'est la fille qui joue. Tout le monde suit toujours?

« Je vous partage ce document » ne se dit PAS.


Ai ou ais : futur ou conditionnel?


«Je serai ravie de vous revoir à cette occasion» : met-on un «s» à serai? La règle de grammaire souvent oubliée est assez simple : elle demande d'appliquer la concordance des temps. Avec une condition au présent, c'est le futur qui suit. «Si tu viens le 15, j'en serai ravie». Avec une condition au passé, le conditionnel. «Je serais rassurée si tu pouvais venir le 15». «Dans le doute, je conseille de penser la phrase avec nous : "Si tu viens le 15, nous serons ravies", conseille Anne-Marie Gaignard. On voit bien qu'il s'agit là du futur.»


Les expressions qui tuent


Attention, breaking news : «Je vous partage ce document» ne se dit PAS. D'abord, on partage quelque chose AVEC quelqu'un, pas à lui. Et partage-t-on un document ? «C'est du langage parlé, tranche Anne-Marie Gaignard. Mieux vaut écrire : "veuillez trouver ci-joint le document X" ou "Voici en pièce jointe le document Y"».


De même, les très utilisés «je vous fais un retour» ou «je reviens vers vous» sont à proscrire, car impropres. En résumé : ils ne veulent rien dire. Sachez aussi qu'on amène une personne mais qu'on apporte un objet ; qu'on ne dit jamais «manger» mais déjeuner ou dîner. De même qu'on ne vient pas sur Paris mais à Paris. Et qu'il est fortement souhaité de bannir les pléonasmes (au jour d'aujourd'hui, incessamment sous peu, c'est ma première priorité)... «Cela n'a l'air de rien, mais tous ces détails sont autant de critères de sélection à l'embauche, poursuit Anne-Marie. Dans un dîner, vous pouvez avouer que vous êtes nulle en maths, personne ne vous en voudra. Ne pas maitriser la langue française, c'est plus compliqué, cela dit autre chose. Qu'on me comprenne bien : mon idée n'est pas de stigmatiser ceux qui font des erreurs, mais bien de leur dire : ne restez pas comme ça!Il est possible de se réparer. Cela a moi-même été mon cas !»


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Fin de mail : éviter la chute libre


C'est la question shakespearienne moderne : chuter ou ne pas chuter, telle est la question! Persuadés de l'élégance de la formule, beaucoup terminent leur mail d'un emphatique : «bien à vous»... qui signifie littéralement : "tout à vous" (=je vous appartiens). A éviter, donc, ainsi que les sentiments («avec mes meilleurs sentiments») d'une femme vers un homme (et réciproquement)... ou à éviter tout court. Le «cordialement» conviendra mieux, sous réserve que vous ayez déjà rencontré la personne - on ne peut pas être cordial avec quelqu'un qu'on ne connaît pas.


A enterrer définitivement en revanche : le florissant «belle journée», employé à toutes les sauces, qui non seulement ne se dit pas mais dans un mail «business», marque une intrusion dans la vie privée, comme bon week-end ou bonne soirée. «Dans un mail formel, "à bientôt" équivaut carrément à "bon bah salut"», tranche Anne Marie Gaignard. Quel choix reste-t-il donc pour conclure efficacement votre missive? «Dans un mail formel, on recommande les formules d'usage : "je vous prie de bien vouloir agréer l'assurance de ma sincère considération", ou "dans l'attente de votre réponse,...". Pour les mails rapides et quotidiens, un simple merci peut suffire.» Nous sommes preneurs d'autres propositions !


Et sinon...


Sinon... reste encore la question de l'accord des verbes réfléchis et pronominaux. Mais cela fait peut-être beaucoup pour un seul et même article. Les plus pointilleux pourront se replonger dans les indications du Bescherelle (disponibles ici). Pour les autres... on ne leur souhaite pas une belle journée, CQFD. Mais le cœur y est !


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